AU FIL DES MOTS à Chavagnes-en-Paillers

AU FIL DES MOTS à Chavagnes-en-Paillers

Septembre 2022

Jeudi 22 septembre 2022

Itinéraire

 

 

La carriole ou la draisienne, la montgolfière ou le planeur, le hors-bord, le V.T.T. ou le T.G.V. : tous ces moyens se sont avérés bons pour ceux qui, quelle que soit la somme qu'ils ont économisée, s'en sont allés découvrir le vaste monde riche de tant de curiosités à ne pas laisser passer ! De la presqu'île de Quiberon à l'isthme de Corinthe, du Sphinx au Manneken-Pis, des hamadryas d'Afrique aux ornithorynques d'Australie, du Connemara à l'Annapurna, ils se sont tous étonnés, se sont esclaffés aussi, face à toutes ces merveilles réunies. Tant de découvertes ont naturellement fait évoluer chacun d'eux. Les peuples qu'ils ont côtoyés, les photographies qu'ils ont accumulées ont forgé d'indélébiles souvenirs qu'ils aiment à se remémorer, par-delà les frontières de l'espace et du temps.

Micheline Sommant

 

Juste ciel !

C'était le paradis des temps bibliques. Les daines côtoyaient sans crainte coyotes et chacals dans les forêts mêlant séquoias et sycomores. L'eyra n'effrayait pas la hase, pas plus que le léopard la marmotte, car les félidés ne s'attaquaient alors à aucun animal, si inoffensif fût-il. Toutes les bêtes que Dieu avait créées vivaient en parfaite harmonie. Quant aux plantes, colchiques immaculés ou hélianthes aux pétales ambrés, elles s'épanouissaient sous des ciels d'un bleu azuréen. Seuls humains, Adam et Ève parcouraient, plongés dans une douce béatitude, ce lieu idyllique aux délices infinies, jouant parfois à saute-mouton avec les loups en bayant nonchalamment aux corneilles.

Mais ce matin d'été éternel là, Ève se lève subitement, de bruyants borborygmes s'échappant de ses viscères tenaillés par la faim. Elle se dirige vers son coin d'ouche habituel pour se sustenter de quelques agrumes cueillis sur l'arbre. Cependant, le pamplemousse s'avère vert et le cédrat sur ; aussi passe-t-elle à l'orange. C'est là, au sein de la ramée du pommier d'à côté, celui-là même que toutes les créatures du Tout-Puissant se sont vu interdire de toucher qu'un beau boa s'agite. N'en croyant pas ses yeux en amande vert olive, Ève hèle Adam et lui demande de ramener sa fraise. Il arrive en bâillant, les cannes tout ankylosées d'un sommeil pâteux, et se banane presque.

L'ophidien aglyphe désigne de sa langue bifide une reinette très parfumée. Ève hésite, se dandine, entre le zist et le zest(e). Elle sait qu'elle commet le péché de la chère, mais la tentation est trop forte : elle se saisit du fruit défendu et mord dedans à pleines dents, au dam d'Adam. Celui-ci le lui arrache et, brandissant l'objet de la forfaiture, lui explique vertement que cette pomme lui restera en travers de la gorge. C'est alors que Dieu surgit en majesté et jarrette sur-le-champ du jardin d'Éden les deux pauvres diables en tonitruant :

« Marauds, si vous vous étiez creusé le citron avant de carotter mes clochards préférées, dont je me sers pour la confection des tatins, ce pépin ne vous serait pas arrivé ! Maintenant, ce sont vos consciences qui vont taler ! »

Philippe Dessouliers

 



27/09/2022
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